En 2013, un premier festival, du même nom, avait eu lieu dans la même salle...
Unit Wail, Setna,
Neom et
Scherzoo. Dix ans après, aucune de ces formations n'étant encore en activité, le label d'Alain Lebon a voulu marquer le coup avec un dernier Festival. Belle initiative qui a permis de réunir quatre groupes :
Caillou (reformé),
Vak (à découvrir),
One Shot (qu'on ne présente plus) et
Rhùn et
Free Human Zoo pour la dernière soirée, la seule à laquelle nous avons pu assister. Et pour un tel évènement vous aurez droit à une chronique à quatre mains, un vieux briscard de ces scénes alternatives et une âme pure et sincère...
La première partie de la soirée fut assurée par Rhùn, qui nous a proposé une zeuhl assez littérale. J’avoue ne pas avoir totalement adhéré. Sans remettre en cause l’engagement ou la sincérité des musiciens (ainsi la joie manifeste du guitariste, nouvellement intégré au groupe, faisait plaisir à voir), mais peut être à cause d’un manque de soin apporté à leur présentation en scène, ou de l’absence de mélodies évidentes dans leur discours musical, je n’ai pas réussi à entrer dans leur univers . Je n’en dirai donc rien de plus.
C'est délicat à dire mais Rhùn ne m'a pas convaincu lors cette soirée. Trop uniforme, trop prévisible, trop dans les clichés "Zeuhl". Certes il y a de l'énergie, un peu à la japonaise (Ruins etc...), de la bonne volonté mais le groupe ne maîtrise pas la scène faute de pratique, sans doute. Rentré chez moi, j'ai écouté leur dernier album qui est bien au dessus de cette prestation parisienne. Un rendez-vous manqué donc, et c'est dommage malgré le son de la batterie, la "banane" du guitariste, le son à la "Paga"du bassiste... Mais la Zeuhl est lyrique avant tout et pas seulement une machine...
Après un changement de plateau un peu long – mais nécessaire pour installer le matériel, c’est Free Human Zoo qui monte sur scène. Ayant été très séduite par leur dernier album, j’étais impatiente d’en découvrir la traduction en live. Autant le dire tout de suite, je n’ai pas été déçue et c’est un très beau moment que nous avons passé. Dès son arrivée sur scène, l’équipe occupe l'espace. Ils sont nombreux et hormis la chanteuse -vêtue au demeurant avec recherche et élégance, ils portent tous une déclinaison du T-shirt à l’effigie du groupe, démontrant déjà dans le visuel cette homogénéité et cette cohésion qui se traduiront ensuite dans la musique. C’est, du reste, assez remarquable de voir une telle synergie entre des musiciens qui, on peut le déplorer, n’ont pas si souvent l’opportunité de faire des concerts ensemble.
Premier morceau, une revisitation de Maniacus, issu de l’album Freedom Now, et qui pour l’occasion, revêt de nouvelles couleurs. Bien que n’ayant pas été joué depuis une dizaine d’années, il n’a pas pris une ride et trouve dans son nouvel habillage une vigueur et une fraîcheur très appréciables. Après cette belle introduction, c’est Gilles Le Rest qui prend la parole depuis sa batterie pour présenter la suite des réjouissances. Il évoque le dernier album du groupe, The Mysterious Island, et parle du voyage auquel il espère nous convier. Le terme sied effectivement comme un gant à ce répertoire : voyage dans nos mémoires pour ceux qui ont connu la série, voyages verniens du capitaine Nemo, voyage musical pour tous quoi qu’il en soit. Sans qu’elle soit forcement toujours gaie, il émane de cette musique une vraie joie, (certainement amplifiée encore par l’échange avec un public attentif et conquis), quelque chose de profondément vivant et riche. Elle ne renie pas ses influences mais sa force créative lui permet de tracer son chemin de façon originale et d’affirmer sa propre voix. En terme de répertoire, une grande partie de l’album sera jouée : Excipit, L’île mystérieuse part 1 et 2, L’essentielle ascension, Les vasques d’eau turquoise, Premiers craquements, Éruption, La nef des hommes de l’ombre. Je retrouve les morceaux que j’y avais préféré, toujours portés par le jeu félin, efficace et tout en finesse de Gilles à la batterie, mais dopés par ce petit plus qu’apporte la scène. La virtuosité des autres musiciens sert à merveille le foisonnement, la danse qui nous emporte. Ainsi l’alternance de la basse et de la contrebasse, offre des changements de couleur intéressants. On soulignera aussi la performance de la chanteuse, Marie Christine Revranche, dite Lousse. Par ses graves amples et timbrés jusqu’à ses aigus clairs comme des chants d’oiseau, ses jeux avec le souffle et le son, d’un registre à un autre, elle donne à la voix sa place d’instrument à part entière en dialogue comme en complémentarité avec les autres, notamment avec le saxophone de Matthieu Metzeger -ou plutôt les saxos puisqu’il va jouer du sax tenor et soprano, parfois même en même temps ! A la guitare, Alexis Delva (membre aussi de la famille Anaid) amène l’énergie de sa jeunesse et son swing, et au clavier, Camille Petit assure ce numéro d’équilibre entre accords rythmiques, boucles sérielles et mélodie. Le trombone de Laurent Skoscek, pilier du groupe dans la durée, complète la palette de ses tonalités chaudes. Le public ne s’y trompe pas et c’est avec une standing ovation unanime qu’il salue les musiciens a à la fin du concert.
Il aura fallu que quelques mesures à Free Human Zoo pour prendre possession de la scène et de la salle. Une ambiance, une musicalité se sont rapidement imposées faisant frissonner le public assez rapidement. L'apport d'Alexis Delva est assez déterminant dans la formation actuelle et la présence de Lousse apprte une jolie touche féminine. Je n'avais vu le groupe qu'en 2013, au Triton, et c'était encore balbutiant. Je suis ravi de les avoir revu car la travail paie malgré quelques petites longueurs en fin de set. Un très joli moment.
La fin ? Pas tout à fait ! Car une surprise de taille nous attendait encore : la présence de Klaus Blasquiz ! L’occasion pour moi et, sans doute pour pas mal de gens dans la salle, de voir et d’entendre Klaus en live pour la 1er fois. C’est donc une interprétation de Klaus Kombalad à trois voix avec Gilles, tambourin à la main et Lousse (Pierre Lebouteiller de Rhun étant sur remonté sur scène pour assurer la partie batterie) qui vient couronner et clore cette belle soirée.
Cela fait toujours plaisir de voir l'ami Klaus. Il a toujours une bonne blague a raconter, même sans son carnet et ce morceau est évidemment emblématique pour lui. Je pense qu'il n'avait pas été joué depuis Sidji Moon et cette version un peu impro a fait plaisir au public rassemblé en ce lieu non antique.
Après cette conclusion en forme de clin d'oeil, et de retour aux sources, il fut temps pour les musiciens et le public de se séparer, chacun reprenant son chemin plein de cette "aventure musicale de libération et d'émancipation*" et heureux d'y avoir participé.
* Formule empruntée au groupe lui-même.
Article & Photos : Eurydice Anahé & Memorizator
Et pour le même prix, quelques photos en plus...