Petit rétropédalage... Le Grand Rex, salle mythique de 1932, joyau art-déco et plus beau cinéma au monde parait-il, situé sur les Grands Boulevards, avec son célèbre plafond de ciel étoilé, ses décors méditerranéo-antiques et sa grande arche lumineuse entourant la scène. 2700 sièges du strapontin au fauteuil en cuir en passant par de moelleux sièges de velour. Même les toilettes, avec ses mosaïques blanches et dorées sous de belles arches, donnent envie de bien viser pour préserver le lieux et l'ambiance !!!
Le trottoir grouille de monde, la file d'attente de l'après midi pour le dernier film de Thomas Croisière, une fois tarie, se remplie à nouveau pour l'événement du soir, le concert de Magma ! Il faut dire que le message envoyé à tous par le Grand Rex nous demandant d'être présent très tôt pour pouvoir être assis dès le début du concert annoncé pour 20h00, y est certainement pour quelque chose. Sinon, sur l'espace piéton extérieur, le trottoir donc, l'on croise à plusieurs reprises, Hervé, Christian, Rudy, le staff technique, des mères de musiciens... Du beau monde fréquente cet espace asphalté ! Et en levant le nez, le lettrage "Magma" allant du jaune au rouge en passant par l'orangé, entouré de deux sigles le tout sur fond noir, ça en impose sur cette façade emblématique dominé par un REX d'actualité, car Magma est roi ce soir !
Finalement la salle se remplie gentiment une fois passé le contrôle des sacs, suivi d'une visite obligée au stand Seventh. On regarde le lieux, on observe, on admire et puis on attend gentiment l'heure fatidique, qui ne sera pas 20h00 mais 20h10, sans doute histoire de nous contrarier ou d'attendre les derniers spectateurs dans une salle pratiquement pleine.
Simon, au micro, nous annonce le déroulement du programme. Une première partie avec Pierre-Michel Sivadier suivie par le concert de Magma.
Tout le monde ne connait peut être pas P-M Sivadier (Voir Ici ou Là) et pourtant, comme il l'a dit lui même, il fut un compagnon de parcours de Christian, Stella, Offering et Magma, en tant que musicien et/ou compositeur. On le retrouve ainsi par exemples sur Affiïeh, A tous les Enfants, D'Epreuves d'Amour, Le Cœur Allant Vers ou John Coltrane l'Homme Suprême et bien sûr de nombreux concerts de 1988 à 1998. Nous reviendrons sur ce dernier album.
PMS, s'il me permet d'ainsi le nommer, s'installe derrière un piano à queue et entame les trois titres suivants Follement Doux, Il n'y a que toi, Comprendre les marées, mélodies poétiques que l'on pourrait situées dans l'univers de certaines chansons de William Sheller par exemple, ou alors dans l'ambiance piano-bar. Certes nous sommes loin de Magma mais cela rappelle les concerts du début des années 90 ou Christian et Stella nous proposaient d'autres couleurs de leurs talents multiples en mêlant chansons enfantines, chansons françaises, compositions et improvisations d'Offering, bref, un peu de nostalgie d'un passé pas si lointain. Le titre suivant, Romance bien que toujours dans le même univers, nous rappelle dans son phrasé au piano une forme de jeu "à la Magma" par ces séquences répétitives que l'on trouve dans MDK par exemple. Attention, n'y voyons pas une chanson zeuhlienne mais plutôt des similitudes fort agréables pour nos oreilles ! Le dernier titre de cette première partie n'est autre que Coltrane à l'Instant composé en 2011 pour l'album hommage de Christian Vander John Coltrane l'Homme Suprême. Pour ce dernier titre, sont invités pour l'accompagner sur scène Laura, Caroline, Sylvie et Isabelle au chant ainsi que Thierry aux claviers. Tous ces musiciens enrichissent le propos mais sans lui enlever sa délicatesse. Pierre-Michel profite de ce titre pour nous parler de Stella, nous dire que même si elle ne peut être présente ici pour de bien compliquées raisons médicales, qu'elle l'est dans nos esprits et nos cœurs. C'est sûr...
Après nous avoir salué il laisse la place au dixtuor ou decet de Magma, le temps que les techniciens installent rapidement un clavier électrique sur le piano acoustique et réorientent le tout vers la batterie, ce qui permettra au public de droite (à droite de la scène, pas de politique ici !) d'apprécier le jeu de Simon sur ces claviers.
Les premières notes de Félicité Thösz emplissent la salle et sont accompagnées d'applaudissements généreux. Le concert se réoriente alors vers un climat électrique et éclectique. Eclectique en ce sens où Magma et Offering seront de la partie, couvrant des compositions de 1970 à 2012, c'est dire !Félicité Thösz donc, titre bien rodé depuis son retour sur cette tournée, sa dernière apparition datant du 26 juin 2019 à la Philharmonie de Paris. Ce titre, au fur et à mesures des concerts, voit quelques changements ou réglages, incluant un petit solo de piano de Simon, voyant l'échange entre Christian et Sylvie ce soir raccourci (me semble t il), où Laura nous montre la force de son talent sur un petit lead et où Christian nous rappelle sur sa partie vocale toute sa puissance. Caroline reprend les parties de Stella, avec force, y mêlant une espèce de duo avec Hervé sur certains passages. Belle entame de concert pour Magma mais subitement arrêté pour laisser le public aller remplir ou vider ses contenants. Rage que de voir cette première heure s'interrompre, on était vraiment dedans. Mais c'est une tradition parisienne que nous avait expliqué l'an passé Stella que cet entracte...
On nous a promis 20 minutes d'arrêt en gare de Bonne Nouvelle, et c'en est une autre qui arrive, les lumières s'estompent à nouveau et la troupe revient au combat. Et quel combat ! Un K. A. puissant et nerveux s'offre à nos oreilles, avec le passage d'Om Zanka en clef de voute, éblouissant, Jimmy en venant à taper ses cordes pour mieux asséner ses notes. D'ailleurs le public ne s'y est pas trompé et a manifesté dès les premières notes de ce passage, sa joie par un bel applaudissement spontané. Pour autant, ce morceau alterne aussi avec des parties plus reposées et délicates, nous montrant ainsi toute la richesse des compositions de Christian. Là encore, quel plaisir que de retrouver cet opus rejoué sur scène en 2002 et sa sortie en album ce qui avait créé l'événement mais que nous n'avions plus entendu en live depuis le 22 novembre 2014 voire 17-12-2024 si l'on excepte les K. A. 1 joué entre 2018 et 2023, c'est dire.
Nous attendions un enchainement avec Auroville ou bien une surprise mais c'en est une toute autre surprise qui arriva avec nos musiciens posant baguettes et cordes et se plaçant sur le coté de la scène. Bien évidement, le public réagit avec force d'applaudissements, sifflets et tapage de pieds, et magie féérique, les musiciens reviennent !!
Mais là, une vraie surprise puisque retentissent les premières notes de Kobaïa ! Alors, l'on savait que pendant les balances de la tournée 2025 ce titre fut joué, mais comme il ne l'a jamais été en concert cette année on avait fini par ne plus y croire, donc réelle surprise disais je. Ce premier rappel, bien enlevé, dynamique à souhaits et en anglais, réveille nos souvenirs façon madeleine de Proust, ce titre ayant été joué très souvent en rappel (ou non) depuis le retour de Magma en 1996. Rudy nous offre un joli petit solo démontrant, s'il était nécessaire, tout son talent.
Et quant il y en a pour un, il y en a pour deux. Un deuxième rappel, Ehn Deïss, lui aussi joué souvent ces dernières années, mais nous ne nous en plaignons pas, bien au contraire ! Christian au chant bien sûr, les chœurs étant tenu par tous les autres musiciens, Jimmy inclus, seuls Rudy et Simon restants à leurs instruments. Pierre-Michel Sivadier venant se joindre à cette grande chorale. Rudy remet un petit couvert guitaristique et, nouveauté, tous à l'exception de Rudy, viennent sur le devant de la scène sur la fin du titre pour cette dernière incantation et pour nous saluer.
Et oui, malgré les efforts du public, c'est vainement qu'ils furent rappelés, et pourtant nous y avons cru à un autre morceau, car Spiritual, lui aussi répété cette année, aurait pu nous être proposé pour ce concert VIP. Mais non, les lumières se rallument et tout le monde s'en va. Oui, peut être le seul bémol de cette magnifique soirée qu'il n'y ai pas eu un petit plus. Bon, ne boudons pas notre plaisir, pas sûr que pour les 100 ans de Magma nous en ayons autant...
Petite anecdote, sur l'escalier du retour, j'ai croisé Cédric Villani, mathématicien de renom, titulaire de la médaille Fields 2010 (l'équivalent du Nobel pour les maths, excusez du peu...), reconnaissable avec ses cheveux longs et son costume coloré et ne ressemblant pas au scientifique tel que nous le voyons de coutume dans les médias. Lui aussi a passé une superbe soirée.
Magma peut compter sur lui. Après tout, normal pour un mathématicien...!
Photos : Jean-Christophe "Mémorizatör" Alluin (sauf Grand Rex de nuit par moi même).